dimanche 15 mars 2009

La fin de l'enfant roi ?

Dossier réalisé par Laurence Haloche et Sophie Roquelle

24/10/2008

Crédits photo : Getty Images

Enfants perturbés, parents déboussolés, psys débordés : Dolto est plus que jamais contestée. La célèbre psychanalyste serait-elle passée de mode, ou victime de son succès ?

Il y a un peu plus de trente ans, une voix s'élevait à la radio pour défendre « la cause des enfants ». Pour la première fois, une pédiatre et psychanalyste parlait aux parents de leurs « devoirs » vis-à-vis de leurs enfants, de leur rôle d'éducateurs et d'« écouteurs ».

Chaque jour sur France Inter, de 1976 à 1978, Françoise Dolto a répondu aux interrogations des parents, toujours concrète, pratique, avec un charisme inouï et ces « fulgurances » que tout le monde lui reconnaît encore aujourd'hui. L'enfant n'est pas un « petit animal domestique » qui doit être dressé mais est « une personne », répétait-elle inlassablement, un « être de langage » à qui il ne faut rien cacher « des vérités qui le concernent », un être de « désir » et d'« intelligence », accessible aux explications, que ses parents doivent soutenir et accompagner dans son développement.

« Lorsque l'enfant paraît » connaît un immense succès : mille lettres de parents sont lues à l'antenne. Le phénomène Dolto était né. La grande dame de la psychanalyse aux allures de grand-mère idéale, disparue en 1988, révolutionnait l'éducation des enfants.

Deux générations plus tard, elle est toujours au coeur des débats sur l'enfance. Snobée par une partie des psychanalystes, qui lui reprochent son hyper-médiatisation, elle est aussi contestée par un nombre croissant de pédiatres et de psychothérapeutes, constatant chaque jour dans leur cabinet les dérives d'une éducation laxiste, centrée sur le seul désir des enfants.

Et si, en libérant les enfants, Françoise Dolto avait aliéné les parents ? Du credo « l'enfant est une personne », on aurait ainsi subrepticement glissé vers l'enfant roi, puis l'enfant tyran.

Ses nombreux défenseurs jurent que Dolto n'a jamais prescrit l'effacement de l'autorité parentale, bien au contraire, et que si la place de l'enfant est au centre de la famille, il ne doit pas occuper le centre tout entier de la vie familiale.

Mal comprise, peut-être. Piégée par une vulgarisation excessive de son discours, certainement. Françoise Dolto, dont on célèbre le centenaire de la naissance ces jours-ci , serait en tout cas stupéfaite d'assister aujourd'hui à une déferlante d'ouvrages sur le retour de l'autorité et la multiplication des appels à la sévérité. Sans parler de la réapparition de l'instruction civique à l'école et des polémiques qui ont secoué la classe politique sur la détection de la délinquance dès l'âge de 3 ans.

Simple retour de balancier ? Tout le monde s'accorde à dire en tout cas que les parents n'ont jamais été aussi perdus face à des enfants qui, enivrés de liberté et d'autonomie, ne vont pas très bien non plus.

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